Pour la première fois, Femmes en Mouvement a accueilli 3 directrices de filiales de réseaux de transports en commun pour un apéro spécial le mardi 15 mars 2022 !

Nous étions à la Cité Audacieuse, un lieu dédié au rayonnement du droit des femmes, créé par la Fondation des Femmes et proche du jardin du Luxembourg, avec :

• Marie Bauduin, Directrice du réseau de transport de l’agglomération Montargis et Rives du Loing (Keolis),

• Leila Garnier, Directrice Générale de Transdev Reims

• Chantal Austin, Directrice de filiale chez Lacroix-Savac

Marie Bauduin, Marie-Xavière Wauquiez, Chantal Austin et Leila Garnier.

« La dimension humaine est au cœur du secteur des transports en commun »

Cet apéro était l’occasion de mettre en avant aussi des métiers pas toujours bien connus des femmes et pourtant riches en opportunités de carrière.

Nos trois invitées ont évoqué leur parcours professionnel et le fait de travailler dans des milieux majoritairement masculins.

Après 14 années et 3 postes chez Securitas, leader mondial de la sécurité, Chantal Austin s’est challengée en changeant volontairement de domaine : les transports publics de voyageurs. Elle est actuellement directrice de filiale chez Lacroix-Savac. « Les hommes ne m’ont jamais fait peur, dit-elle en souriant. J’aime les défis, éviter la routine et tenter des choses ». Lorsqu’elle regarde sa carrière, trois éléments saillants ressortent : la dimension humaine, que ce soit au niveau des équipes, des clients voyageurs ou collectivités ; l’innovation, notamment avec l’irruption du numérique qui a modifié en profondeur les métiers et l’information des voyageurs, et enfin l’importance du dialogue et du respect. « Il y a parfois des moments de négociations difficiles avec les syndicats. Mais il faut apprendre à se faire confiance, à dire les choses même si elles ne plaisent pas toujours et ensuite à respecter ses engagements. C’est ainsi que l’on construit et avance ensemble » analyse Chantal Austin. Aujourd’hui, au sein du Groupe Lacroix-Savac, elle bénéficie d’une latitude et d’une autonomie qu’elle apprécie, orientée résultats et éthique. Ce Groupe, en croissance organique et externe, offre actuellement des opportunités d’emplois à tous niveaux !

De son côté, Leila Garnier, se définit avec fierté comme une femme, une mère, passionnée par son métier. « J’ai toujours adoré les transports. Enfant puis adolescente, j’étais fascinée par le bus et le métro, qui me permettait de passer d’un quartier à un autre. Une de mes professeurs au lycée m’a dit que je devrais travailler dans les transports car je comprenais bien comment fonctionnait le monde, la géopolitique. Cela m’ouvert des perspectives ! ». Après un stage à la RATP et un 3ème cycle de transport urbain à Cergy, Leila intègre Veolia Transport (qui a fusionné ensuite avec Transdev). « Ce groupe m’a fait confiance : les 3 premières années, j’ai eu un statut de cadre pépinière grâce auquel j’ai pu découvrir différentes entités et métiers du groupe. Ce qui m’a frappé, c’est la dimension humaine, au cœur de notre activité ». Au bout de 3 ans, Leila choisit l’opérationnel comme responsable d’exploitation à Amiens. « Un poste très dur, avec des syndicats virulents et quelques dérives communautaristes. Mais j’ai beaucoup appris et le poste était passionnant ». Puis à 27 ans, alors qu’elle est enceinte, son supérieur lui propose un poste de directrice en Normandie. « Il m’a aussi dit de prendre soin de moi et m’a fait envoyer de magnifiques fleurs lorsque j’ai accouché. C’est parce que le groupe prend soin de ses collaborateurs, que j’ai envie de lui donner beaucoup. Et à mon tour de faire ces petits gestes envers mes équipes » analyse Leila. Après un poste en Bretagne, où elle dirige la Compagnie Armoricaine de Transports, elle devient directrice générale de Transdev Reims (540 salariés, 135 bus, 1 ligne de tramway). « J’ai d’abord eu le réflexe de refuser ce poste, puis j’ai accepté car c’était une marque de confiance et le groupe nous accompagne très bien dans nos évolutions de carrière. Aujourd’hui, je suis mentor après avoir eu moi-même des mentors qui m’ont permis de me projeter dans des postes de direction. Par ailleurs, Transdev a développé un programme « Leader au féminin » pour aider d’autres femmes à accéder à des postes de direction » explique Leila Garnier. « Je suis très fière de mon Groupe qui sait mettre en valeur tous ses collaborateurs et les accompagner afin qu’ils ne sentent jamais seuls et puissent évoluer ». Elle ne cache pas certains aspects plus difficiles de ses fonctions, comme les négociations syndicales. « Il faut être solide, épanouie pour faire ce métier, mais la passion l’emporte toujours » souligne-t-elle.

De son côté, Marie Bauduin a rejoint le monde des transports il y a deux ans. Après 4 années dans le secteur de la grande consommation, dans des fonctions commerciales et marketing, elle rejoint le secteur de l’assurance. « J’ai eu le déclic un jour avec une simple bouteille de lait, raconte Marie. Lorsque j’ai réalisé qu’il m’avait fallu 3 jours pour trouver ne serait-ce qu’un quart d’heure pour aller acheter du lait pour mes deux jeunes enfants, je me suis dit qu’il fallait peut-être que je ralentisse un peu. Entre 150 kilomètres de trajet quotidiens, des réunions incessantes, des négociations très dures avec des acheteurs, le rythme était intense ». Elle restera 9 ans au sein de la société Thélem assurances où elle prend en charge différents postes dans le commercial, la communication et le marketing. En 2019, elle répond à une annonce pour un poste chez Keolis, près de chez elle, en marketing. Lors de l’entretien, on lui propose un autre poste, beaucoup plus important, celui de directrice du réseau de transport de l’agglomération Montargis et Rives du Loing. « Je n’avais jamais imaginé que je pourrais devenir directrice de réseau ! » reconnaît-elle.

Trois éléments l’ont particulièrement marquée dans ce nouveau secteur professionnel. Tout d’abord, la passion et les convictions des équipes. « Les gens sont fiers de faire ce métier. Travailler dans les transports fait sens, car on rend service aux gens. Cela a été encore plus vrai durant le Covid ». Deuxième point : la découverte d’une réalité sociale beaucoup plus diverse, aussi bien du côté du personnel que de la clientèle, que celle qu’elle avait l’habitude de côtoyer dans ses précédents postes. Et enfin, la bienveillance des équipes. « J’étais partie pour le combat et en fait pas du tout ! Jamais personne ne m’a donné le sentiment que je n’étais pas à ma place » souligne-t-elle.  

Ensuite, nos trois invitées ont abordé le syndrome de l’imposteur, un sujet où leurs prises de position étaient unanimes. « C’est un sujet énorme qui devrait faire la Une des médias, s’exclame Leila. Quasiment toutes les femmes sont ou ont été confrontées au syndrome de l’imposteur. On se fait des idées sur un poste, on imagine que l’on ne sera pas à la hauteur. Je l’ai moi-même ressenti ce syndrome par le passé. Maintenant, je ne l’ai plus et je sais mettre en valeur mes acquis. Le groupe Transdev fait beaucoup de choses pour que l’on s’y sente bien en tant que femme et pour nous faire progresser ».

« Je l’ai aussi connu ce symptôme lorsque je suis devenue directrice de région par rapport à des collègues plus âgés et qui en imposaient, reconnaît Chantal Austin. Mais lorsque j’ai découvert la réalité de ce qu’ils produisaient en tant que directeurs d’établissement, je me suis rendue compte que je les surévaluais. Cela m’a aidée à me détacher définitivement de ce syndrome de l’imposteur. Il faut écouter les gens qui croient en vous et saisir les opportunités qu’ils vous proposent ».

En revanche, la question des quotas, de la féminisation des métiers dans le transport a fait davantage débat. « Attention aux quotas et à ne pas trop mettre en avant le genre, estime Marie Bauduin, au risque de décrédibiliser les compétences. Pour moi, la mixité doit venir du bas et non être imposée par le haut. Pour cela, il faut oser postuler à certains postes ou investir des secteurs traditionnellement masculins. Plus les femmes pourront se projeter, plus la mixité progressera ».

De son côté, Chantal estime que les quotas de 40% au sein des conseils d’administration ont été une bonne chose. « Cela a fait évoluer les mentalités et éclater le plafond de verre ».

« Bien sûr que le profil doit être bon, mais je pense que c’est une bonne chose de parler de féminisation et d’avoir des politiques volontaristes. C’est important de faire réagir les hommes et évoluer les mentalités. La mixité apporte une meilleure ambiance de travail et une plus grande efficacité. « J’ai décidé de prendre la parole en tant que femme directrice car on peut être des exemples pour les jeunes femmes. J’ai eu moi-même la chance d’avoir au début de ma carrière des femmes « modèles » qui m’ont beaucoup influencée ».

La question des politiques RH à mettre en place pour favoriser une plus grande féminisation a également été abordée : faire en sorte que les offres d’emploi ne soient pas rédigées exclusivement au masculin mais incluent les femmes par les photos et les mots, adapter les vêtements de sécurité et les environnements de travail pour les femmes, etc.

A la question « Les rapports avec les élus, hommes politiques, sont-ils compliqués dans le transport public de voyageurs », Chantal a répondu qu’il fallait, en douceur et avec pédagogie, savoir dire non à un « politique », en argumentant et en proposant des solutions adaptées au réseau et aux attentes de leurs électeurs, en termes de rapport qualité/prix/innovation à court et moyen terme. C’est cet aspect conseil et accompagnement qu’ils apprécient et qui crée une relation de confiance.

Et chacune a conclu cette table ronde par un conseil :

« Ayez de l’audace, sortez des parcours tout tracés, c’est là où je me suis le plus enrichie », Marie.

« Sachez saisir les opportunités, provoquer la chance, mais sans écraser les autres », Chantal.

« Osez, foncez, soyez passionnée… et sachez rendre les opportunités qu’on vous a offertes ! », Leila.