Synthèse apéro du 20 juin à Lyon

Lors de l’apéro organisé par l’antenne lyonnaise le 20 juin, Fabienne Goudard, directrice de projets Mobilités pour la Région Auvergne Rhône Alpes, et Emmanuelle Balmain, cheffe de projet directeur de l’Etoile Ferroviaire Lyonnaise Métropole de Lyon, ont partagé leurs expériences.

Fabienne Goudard et Emmanuelle Balmain ont insisté sur leurs points communs avant de décrire plus précisément leurs missions. Ces deux professionnelles ont des profils universitaires (et non ingénieures) et partagent leur passion du service public.

Au sein de collectivités territoriales (la Région, la Métropole), elles travaillent toutes deux sur des projets ferroviaires, certes à « forte composante technique », mais surtout « multidisciplinaires et partenariaux ». Leur formation les aide beaucoup à appréhender et à conduire ces projets dans toutes leurs dimensions (économiques, juridiques, organisationnelles, urbanistiques). « La technique n’est qu’un des éléments des projets que nous suivons, il est important de les appréhender dans leur globalité » soulignent-elles.

Fabienne Goudard travaille au sein de la Région AURA depuis 1999. En tant que Directrice de Projets, elle pilote l’ensemble des projets de mobilité servicielle que conduit la Région, à l’échelle régionale et à l’échelle métropolitaine (accords tarifaires, SERM…). Fabienne Goudard porte le sujet de la relation usager tout au long du parcours de mobilité de celui-ci (choix du mode, itinéraire, achat du billet, voyage, etc.). Elle intervient par ailleurs dans l’équipe en charge du dossier d’ouverture à la concurrence des services ferroviaires régionaux. « Mon ADN est de rendre un service au public et de systématiquement interroger les besoins fonctionnels : Pourquoi aider au développement du train ? Qu’est-ce que cela va apporter au territoire ? Aux usagers ? Mon rôle est de poser ces questions, plus que des questions relatives aux techniques ferroviaires. Or ces questions dérangent, car il est courant de trop vite s’engager des solutions, avant même d’avoir hiérarchisé les priorités fonctionnelles (aux besoins de qui souhaite-t-on répondre ? ». Fabienne Goudard a notamment coordonné, pour les acteurs français, le projet de tarification multimodale Léman Pass mis en place au lancement du Léman Express en 2019 et qui a conduit à la création d’une communauté tarifaire franco-suisse. Elle intervient également à l’échelle nationale auprès de différents organismes de concertation (Régions de France par ex) et de normalisation (DGITM-GART-CN03 par ex) .

Emmanuelle Balmain a commencé sa carrière à la direction des transports de la région Haute-Normandie en 1997. Elle a développé les plans d’actions des 7 schémas locaux territoriaux du schéma régional et les plans d'actions intermodaux d'axes ferroviaires. Elle a ensuite intégré la région Rhône Alpes en 2000 pour initier la réflexion d'un "RER du bassin de vie lyonnais". En 2003, elle rejoint la Metropole de Lyon où elle met en œuvre de 2004 à 2008 l'organisation partenariale du projet de Réseau Express Regional de l'Agglomération Lyonnaise et est cheffe de projet de la création de la gare de Lyon Jean Macé. Elle a ensuite à partir de 2011 organisé la conduite de projet partenariale des gares de Part Dieu et de Perrache puis mis en œuvre le mode projet pour l’Etoile Ferroviaire Lyonnaise : du lobbying auprès de l'Union européenne en passant par un débat public d'opportunité. Elle développe, en partenariat, l'organisation opérationnelle entre Sytral et métropole, du projet de Service Express Régional Métropolitain suite à la récente loi SERM. Par ailleurs, elle suit les grands projets d’infrastructures ferroviaires comme le CFAL, Lyon Turin, et les grands flux logistiques en coordination avec la cheffe de projet logistique.

Le réseau de transport ferroviaire lyonnais est en étoile autour de Lyon. Il englobe divers aménagements effectués depuis 2005 sur le périmètre du nœud ferroviaire lyonnais et d'autres lignes de transport en commun de l'aire urbaine de Lyon. Il consiste à la fois en un cadencement des TER, une réorganisation des gares et la création de la gare de Lyon-Jean-Macé en 2009 près de la station de métro éponyme, ainsi que d'un abonnement unique, la carte Oura permettant d'emprunter les TER, les bus départementaux et divers réseaux de transports en commun régionaux. Ce projet urbain a fait appel à de nombreux partenaires (Région, Métropole, SNCF,…) et a été mené sous le prisme de l’usager. « La métropole s’est intéressée au ferroviaire dans les années 2000 car c’était un moyen de diminuer la pollution de l’air, d’améliorer le cadre de vie des habitants en ayant moins de voitures en centre-ville ».

La carte Oura, projet initié en 2005, a une entrée technique : l’objectif était de créer un titre de transport intermodal unifié sur le territoire de la région Rhône-Alpes. Sa mise en œuvre a nécessité la coordination entre plusieurs partenaires et la prise en compte des individus dans leur mobilité globale (déplacements professionnels, de loisirs, tourisme, etc.). « La Région a été le chef de file de l’intermodalité. » Son rôle a été de mettre tout le monde autour de la table pour travailler ensemble.

« Apporter des réponses adaptées aux territoires tout en faisant du commun, et toujours au service des voyageurs », telle est la vision partagée d’Emmanuelle et de Fabienne.

« La métropole n’a pas la compétence de transport collectif ou du ferroviaire. Je ne suis donc pas légitimée par un statut ou une compétence. Et pourtant, au moment des débats autour de l’étoile ferroviaire lyonnaise, je me suis retrouvée au cœur d’un système » a souligné Emmanuelle. « On a utilisé le réseau des villes pour faire entendre qu’il ne s’agissait pas que d’un problème lyonnais mais d’un problème national qui se trouve à Lyon, que cela touchait à la fois les usagers lyonnais mais aussi nationaux et européens. Il fallait que l’Etat et l’Europe soient derrière nous pour développer le TGV, le fret, etc. Il a fallu aller chercher les bons partenaires et les bons financeurs. Le H0 du TGV français se donne en gare de Part-Dieu, les enjeux ne sont pas seulement ceux du territoire, mais il s’agit d’enjeux nationaux, voire internationaux, car nous sommes sur un itinéraire européen.

Fabienne est revenue sur le projet Léman Express, initié en 2016 et mis en service en 2019. Cela a constitué un énorme chantier à plusieurs niveaux : en termes de matériels roulants, d’offre transfrontalière, etc. La région s’est posée en chef de file des AOM françaises. La Région n’a pas été leader de bout en bout mais a permis de trouver des consensus. « Ce fut un projet très formateur, autour du service public, de la multimodalité, etc. L’objectif là encore était de faire du commun pour des voyageurs très différents ».

L’expérience de ces différents projets réussis va aider à développer les six SERM – Services Express Régionaux Métropolitains de la région : Lyon, Saint-Étienne, Grenoble, Genève-Annemasse, Clermont-Ferrand, et Chambéry. Là encore, les questions à se poser : pour faire quoi, qu’est-ce qu’on veut faire ensemble, avant de se lancer dans des études techniques. « Ce sont des projets de territoires qui doivent être conçus et portés par la puissance publique ».

En conclusion, « nous avons davantage l’impression de mener des aventures humaines que des projets techniques » ont conclu les deux intervenantes. Et autre message aux participantes : « On peut faire du ferroviaire sans travailler à la SNCF ! ».

L’ouverture à la concurrence du ferroviaire, « un défi colossal », a également été abordée par nos deux invitées. Aujourd’hui, au sein de la Région, c’est un sujet mené de front par une équipe resserrée, mais qui mobilise tous les services en interface. Les échanges entre régions françaises sont également nombreux, pour partager les retours d’expériences, capitaliser les bonnes pratiques, notamment avec la Région Sud plus avancée sur ce dossier. A une question d’un participant de savoir si cela risquait de diminuer la qualité du service pour l’usager, Fabienne a répondu que « c’est la région qui va prescrire son niveau de service, mettre à disposition des opérateurs le matériel roulant, fixer la fréquence, le niveau de tarif, etc. L’ouverture à la concurrence ne veut pas dire libéralisation ». Ce qui devrait permettre aux opérateurs de se différencier, c’est le service à l’usager, à bord ou en gare et une autre gestion de la masse salariale.

Enfin, nos intervenantes ont rappelé que le modèle économique du train coûte très cher. La question du financement de ce système de transport est actuellement au cœur des débats entre Etat, collectivités (région, métropole, département) et la SNCF. Comment trouver de nouveaux financements ? L’Europe, l’Etat, de nouvelles taxes ?

 

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